Imaginez le scénario. Vous venez de terminer de déjeuner. Vous dégustez votre café en traînant sur Facebook. Entre les vacances de votre cousine et les opinions politiques de cette collègue de bureau que vous appréciez de moins en moins, vous tombez sur un article de Forbes qui explique les avancées que l’intelligence artificielle va apporter à votre secteur. Ça tombe bien, vous en parliez hier avec votre collègue. Vous copiez le lien, ouvrez Slack – ou votre boîte mail, ou Facebook, ou Whatsapp – collez et envoyez. Félicitations, vous venez juste de vous engager dans ce qu’on appelle le « dark social ».

Grâce à l’universalité de cet acte, le dark social est désormais responsable de 84 % du trafic entrant. Si la viralité des réseaux sociaux représente déjà une opportunité pour les marqueteurs, le dark social a tout autant intérêt à être regardé de très près, dans un contexte où les applications de messagerie se multiplient et s’offrent l’assistance d’une intelligence artificielle.

Le dark social, c’est quoi ?

Le concept de Dark Social a été théorisé en 2012 – oui, il y a déjà cinq ans ! – par le journaliste américain Alexis Madrigal. Il se définit par le partage d’articles, et plus largement de contenus, via des canaux comme les messageries privées, les messageries instantanées, l’email ainsi que les applications de messageries Facebook ou d’Instagram. Leur point commun ? Le manque de traçabilité, par opposition aux partages publics sur les réseaux sociaux qui sont facilement analysables. En résumé, le dark social inclut tout trafic entrant attribué à une source inconnue.

Habituellement, le trafic de référence s’identifie par des « tags » attachés aux liens partagés. Si vous êtes arrivés sur cet article depuis une newsletter, via votre feed Twitter, ou si vous le partagez en utilisant les boutons dédiés aux réseaux sociaux en bas de cette page, l’URL que vous utiliserez sera sensiblement différente.

Par exemple, en partageant ce post sur Twitter depuis le blog MilleSoixanteQuatre, le tag suivant sera attaché à l’URL : “percent2F&source=Shareaholic&related=shareaholic”. A l’inverse, si vous cliquez sur un titre depuis Twitter, vous ouvrirez une URL qui sera terminée par le tag “&utm_medium=social&utm_source=twitter”. Ces marques permettent de trier le trafic entrant selon leur source, afin de déterminer le réseau ou le support où votre audience se trouve, et d’ajuster votre stratégie en fonction.

En revanche, la particularité des liens venant du dark social est précisément qu’ils ne contiennent aucune data : en copiant et collant votre lien depuis un site vers un mail, aucun tag ne s’attache au lien, sauf si le lien en question était lui-même issu d’un partage et possédait déjà un tag préalable (et que, contrairement à moi, vous ne supprimez pas tous ces chiffres qui vous semblent inutiles lorsque vous partagez ces contenus). Je suis presque certaine que la plupart d’entre vous n’est pas arrivé sur cet article en tapant “https://millesoixantequatre.com/le-lab-millesoixantequatre/alchimie-et-autres-savoir-faire/pourquoi-strategie-marketing-dark-social” dans votre navigateur. Si vous scrutez attentivement les analytics de votre site web, ce qui apparaît sous le nom « Direct » est en réalité le trafic amené par le dark social.

5 raisons pour lesquelles votre entreprise ne doit pas ignorer le dark social

Alexis Madrigal apporte deux très bons arguments pour considérer l’importance du dark social.

Il explique d’une part que le plus important facteur de partage des contenus est … le contenu lui-même. Un contenu peu qualitatif ne sera pas partagé, peu importe les efforts que vous mobilisez pour l’optimiser et le rendre SEO-friendly.

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D’autre part, le journaliste américain explique que l’émergence des réseaux sociaux n’a pas créé le social web tel qu’on le connaît aujourd’hui, mais a structuré des canaux qui existaient déjà en permettant de publier – et tracker – nos interactions. L’évolution des commentaires sur les sites web en est le meilleur exemple : là où ceux-ci pullulaient il y a 10 ans, ils ont progressivement migré vers les réseaux sociaux.

Un bon contenu bien partagé ne suffit donc plus. Il faut désormais inclure le dark social dans les stratégies marketing pour maximiser le reach.

#1 Le dark social est partout

En 2016, la majorité de l’engagement en réponse au dark social s’est fait sur mobile. Alors qu’ils étaient de 53 % en 2014, ils dépassent désormais les 62 % depuis février 2016. Le reste (38%) vient des ordinateurs.  De la même manière que les usages web se transforment et que le trafic est devenu majoritairement mobile, le dark social est partout, et n’est pas réductible à un seul device : c’est un mode de partage transversal.

#2 Le dark social a un énorme impact sur le trafic

Selon une étude de RadiumOne, en 2016, le taux de partages « invisibles » a bondi de 69 à 84 % en quelques années. Comparez ces chiffres au trafic des réseaux sociaux : seulement 11% de partages sur les réseaux sociaux viennent directement des sites, et 21 % des réponses via mobile viennent de Facebook. Pour chaque contenu partagé sur les réseaux sociaux à partir de son site web, le même contenu est partagé 7 fois en souterrain via des messageries privées.

#3 Le dark social offre une forte opportunité marketing 

La data provenant du dark social peut donner une représentation détaillée des intérêts des consommateurs, si elle était exploitée : des informations qui sont primordiales pour aider une entreprise à toucher – et adresser – l’ensemble de son audience.

#4 Le dark social atteint des tranches d’âge uniques

Selon l’étude menée par RadiumOne, 46 % des 55+ partagent uniquement du contenu en souterrain, au contraire des 16-34 qui ne le font qu’à hauteur de 19 %. Le dark social permet donc aux entreprises de récolter des données et d’atteindre une cible qui n’est pas sur les réseaux sociaux.

#5 Les partages dark social sont majoritaires dans de nombreuses industries

Pour des secteurs comme la finance, la restauration ou le voyage, le dark social représente plus de 70 % des partages de contenu !

Pourquoi (et comment) mesurer le dark social ?

Toute entreprise qui publie du contenu web doit savoir d’où vient la majorité de ses lecteurs. Que le dark social atteigne 60 ou 16 % du trafic web, il doit être connu et utilisé par les marqueteurs.

– Raccourcissez vos URLs pour des liens plus propres qui permettent de drainer plus de data. Quels outils ? Hootsuite ou Ow.ly.

– Facilitez les partages publics en rendant les partages vers les réseaux sociaux plus évidents sur votre site : les visiteurs ne doivent pas se demander si tel bouton sert à partager un contenu, le site ou suivre la marque.

– Les outils dédiés au dark social sont vos meilleurs amis. Po.stShareThis ou GetSocial.io permettent de mieux tracer le trafic issu des échanges privés.Comme Madrigal l’a si bien dit, il n’est pas possible d’entrer dans les boîtes mails ni dans les messages privés de vos lecteurs. Il n’y a pas de fournisseur d’accès à contacter, pas d’algorithme à déchiffrer. Le meilleur moyen d’être certain que votre contenu est partagé reste encore de créer un contenu intéressant, qualitatif et original.