En matière de communication engagée, Carrefour a marqué l’année 2018 avec sa campagne coup de poing « Act for food ». Au menu : moins de bullshit, plus d’action : la marque passe du « market to sell » au « market to serve », une grande tendance à suivre (et à adopter) en communication. Décryptage.
Le contexte
La grande distribution est entrée dans une nouvelle ère. Exit les campagnes autour de la guerre des prix : en bouleversant les codes avec sa très primée « L’amour, l’amour », Intermarché a ouvert la boîte de Pandore à ses concurrents… qui se sont engouffrés sur ce nouveau territoire de communication. Au-delà de l’émotionnel, c’est le pli du « manger mieux » que tout le secteur s’est approprié. Les 3 mousquetaires ont mené la bataille des « légumes moches », U a créé son appli « Y a quoi dedans », un Yuka qui détecte la présence de substances toxiques, et « Auchan agit » en proposant des légumes à moins de 1 € et sans pesticides.
Mais le « manger mieux », c’est aussi un héritage pour Carrefour qui occupe le terrain depuis 1992. À l’époque, l’enseigne lance son offre bio – une première pour la grande distribution – puis supprime les OGM des produits de sa marque en 1999, quatre ans avant que la législation ne tranche sur la question. En 2013, Carrefour propose, dans le cadre de son plan agro-écologie, la première filière française de poulets sans traitement antibiotique.
Le constat : L’ensemble du secteur s’approprie le « bien manger », nouveau topic en or des distributeurs.
Le challenge : Faire émerger Carrefour comme un leader légitime et avant-gardiste sur le sujet.
Le Marché Interdit : Les premiers pas
Carrefour jette un pavé dans la marre en s’engageant à braver l’interdit pour proposer plus de fruits et légumes dans ses rayons. Au menu, la marque s’attaque à la législation européenne qui stipule qu’une semence non référencée ne peut être commercialisée. Une mise en conformité qui coûte la bagatelle de 6 000 à 15 000 euros – de quoi étouffer les petits producteurs.
Le distributeur propose alors de commercialiser ces semences non référencées pour favoriser la diversité des aliments et se positionner en leader de la transition alimentaire, là où Intermarché joue sur l’émotion et où Super U propose aux consommateurs de scanner leur aliments.
Bilan – Une première campagne coup de poing complètement virale qui est couronnée de succès : le Parlement européen soutient l’initiative et vote une nouvelle législation pour soutenir la production biologique en permettant la commercialisation des semences paysannes sans référencement dans la catalogue du Gnis.
« Act for Food » : Carrefour s’engage concrètement
Le succès du Marché Interdit propulse Carrefour sur le devant de la grande distribution : la marque transforme l’essai en annonçant son ambition de briguer la place de leader de la transition alimentaire avec « Act for Food », un programme mondial d’actions concrètes pour donner accès à une alimentation saine et diversifiée au plus grand nombre.
Dans le sillage du Marché interdit, Carrefour s’engage et donne la parole à des clients critiques pour mieux leur répondre. L’objectif ? S’inscrire dans les nouveaux enjeux alimentaires et dans les nouvelles attentes des consommateurs via 9 mesures clés. Parmi elles : supprimer les pesticides chimiques, bannir 100 substances controversées, améliorer le bien-être animal ou encore garantir la transparence sur la traçabilité des produits – et ce, à travers dix pays.
Bilan – Si le grand succès du Marché interdit a tracé le sillon d’une transformation pour la marque, le programme « Act for Food » achève de positionner Carrefour en leader responsable et engagée sur la scène du « mieux manger ». Jackpot pour le distributeur qui se démarquer de ses concurrents en jouant sur le même terrain, et qui gagne la bataille de l’image dans un contexte en pleine mutation.
Bilan : « On a tous droit au meilleur » ?
Avec « Act for Food », Carrefour se place en leader sur son marché et frappe un grand coup pour améliorer son image en devenant un véritable acteur social. La campagne audacieuse fait oublier les rancœurs que le secteur entretient avec les producteurs en rassemblant les deux camps sous une même lutte, et replace le consommateur au cœur de ses préoccupations.