Exit la guerre des prix, bienvenue dans l’ère de l’émotionnel. Avec le spot « L’amour l’amour », pensé par l’agence Romance, Intermarché se paie une nouvelle image pour booster sa notoriété en sortant des sentiers rabattus par le secteur. Vu plus de 15 millions de fois, le clip a bouleversé les codes de communication de la grande distribution…

Mais en emmenant Intermarché sur le terrain du storytelling et de l’émotionnel, elle a aussi tracé le sillon pour ses concurrents. Carrefour a donc très vite pris la relève avec sa propre campagne axée légumes : « Le marché interdit ». Avec un truc en plus, un truc qui compte : Carrefour crée un service. Spot viral, campagne gagnante qui s’inscrit dans la longévité : avec l’éditorialisation, la marque y gagne, le consommateur aussi. Jackpot.

Le spot de l’année pour Intermarché

L’histoire d’amour est née en octobre 2016. Après un été de lutte acharnée, l’agence Romance a décroché le ticket gagnant pour une idylle avec Intermarché. Le distributeur souhaitait une rupture nette avec la guerre des prix qui régnait chez ses concurrents.

Pour eux, Romance a imaginé un spot aux antipodes des codes du moment. Plutôt que de miser sur un format toujours plus court, qui flirte désormais avec les 8 secondes, l’agence Romance et Intermarché se sont dit oui pour 3 minutes. Plutôt que d’aller sur le terrain de la culpabilisation et de la contrainte du « manger sain », c’est l’amour qui a été le moteur de ce spot.

Résultat : « L’amour l’amour » a été vu plus de 15 millions de fois, a décroché une flopée de prix aux Cannes Lion et a remporté le Grand Prix Stratégie de la publicité – certainement la campagne la plus marquante du premier trimestre, voire de l’année. Et, plus important, 78 % des personnes touchées estiment que le film a amélioré l’image de la marque…

Carrefour ose le Marché Interdit

Avec ce coup de tonnerre, Intermarché a fait fort … Mais a aussi ouvert la boîte de Pandore. En s’aventurant hors des sentiers (ra)battus, les Mousquetaires ont mis la puce à l’oreille de leurs concurrents. Une fois de plus, c’est Carrefour qui les talonne avec une campagne virale et pérenne : « Le Marché Interdit ».

Ce n’est pas la première fois que Carrefour marche sur les plates-bandes d’Intermarché. Deux jours après la sortie de L’Amour l’amour, Carrefour et Marcel Agency tentaient une percée avec un plan de com’ très musclé, axé qualité des aliments, mais très vite éclipsé par le succès phénoménal du spot d’Intermarché.

Cette fois, Carrefour frappe plus fort. Après avoir attaqué le fond de la communication de son rival, il s’attaque à la forme. À travers un clip alarmiste, le distributeur s’engage dans l’illégalité pour défendre le droit des consommateurs. L’idée ? La loi favorise la commercialisation de semences standardisées. Elle pousse ainsi les agriculteurs à délaisser leurs graines anciennes invendables puisqu’elles ne figurent pas au catalogue national des semences. Après un bras de fer de longue haleine qui a opposé les producteurs aux grandes enseignes, Carrefour utilise sa campagne pour passer du côté adverse et rentrer dans le rang des producteurs, soutenu par le syndicat paysan.

Une histoire forte au service d’un message fort : ✔
Une résonnance sociale : ✔
Un engagement retentissant : ✔
Bilan : un puissant vecteur de communication pour une campagne virale.

Le goût du risque

Recontextualisons. Avant de signer avec Romance, Intermarché a vécu une belle histoire avec Marcel – oui, le même Marcel qui chouchoute aujourd’hui Carrefour. De cette passion est née la campagne des « légumes moches », un coup d’épée dans l’eau qui mettait l’accent sur la tendance populaire à associer le « beau » et le « bon » des fruits et légumes. Voilà qui laissait déjà pressentir quelques remous à venir.

Désormais avec Carrefour, Marcel frappe fort. Economiquement parlant, l’enseigne ne gagne pas grand-chose. Mais en termes d’image, le Marché Interdit place le distributeur qui positive en leader d’un nouveau mouvement et en acteur social. Une campagne audacieuse qui fait oublier les rancœurs que le secteur entretient avec les producteurs en rassemblant les deux camps sous une même lutte, qui replace le consommateur au cœur de ses préoccupations, et qui bouscule tellement les codes que même la loi ne lui fait pas peur. Une enseigne qui ose braver l’interdit, et qui le revendique.

Avec ces campagnes nouvelle génération, la grande distribution prend un virage à 180° pour sa communication. Pleins feux sur l’éditorialisation : les deux enseignes racontent une histoire, prennent le parti de l’émotion et construisent un discours qui couronne leur solution. Le tout, au service du consommateur… mais pas que. En valorisant un nouvel aspect de leur image, Intermarché et Carrefour se lancent dans une quête de notoriété inédite, surprenante, forcément gagnante.