Lorsque la marque new-yorkaise de crème glacée Van Leeuwen a changé le packaging de son produit phare pour en faire des petits pots aux couleurs délicieusement pastel, un phénomène curieux s’est produit. Les crépitements des flashs des smartphones ont attaqué les vitrines des supermarchés, le spectre de crèmes glacées a conquis Instagram. En six mois, le chiffre d’affaires de la marque a fait un bon(d) de 50 %. MIAM.
C’est ce qu’on appelle une stratégie inbound réussie ! La première fois que j’ai croisé un des packagings aujourd’hui iconiques de Monoprix, j’ai ri. C’était une boîte de tranches d’ananas, habillée du message « Y a du soleil et de l’ananas ». Je l’ai prise en photo, je l’ai postée sur Twitter, et je l’ai achetée. Depuis, je scrute presque tous les produits de la marque, et j’en achète une bonne partie. En un tour de mots, Monoprix a réussi à me faire oublier le principe psychologique qui dirige mes courses, fondé sur un énorme préjugé : un produit de marque est meilleur qu’un produit « marque distributeur ».
Les réseaux sociaux, fort levier d’inbound
« Je n’avais pas vraiment envie d’une glace, mais l’emballage mignon m’a fait craquer », écrit sur Instagram l’un des nouveaux afficionados de la marque Van Leeuwen, à côté du cliché coloré d’une vitrine – 12K de calories, autant de likes. Une jolie boîte qui coûte quand même la bagatelle de 20 $. Ce que le commerce appelle « achat d’impulsion », Van Leeuwen nomme « eye-candy » : le petit plaisir coupable des courses qu’on a hâte de déballer, de regarder, de goûter. Aujourd’hui, il va de pair avec une stratégie social média, qu’on parle de « personal branding » ou de « brand content » – le marketing lifestyle touche aussi bien la sphère personnelle que professionnelle. Le petit pot glacé rose pâle ? + 52 followers, quitte à ne pas le manger. Pour les clients de ces marques alimentaires, le goût du produit devient secondaire.
Le marketing influenceur : pub 2.0 ?
Sans budget pub, les marques qui font le choix de réinventer leur packaging parviennent à toucher une audience plus large et très engageante. Le coffee shop new-yorkais « Maman » a designé son gobelet avec un motif bohème blanc et bleu. Résultat : les clients sont aussi emballés que le café – Sa co-fondatrice estime que la tasse trendy, devenue iconique, attire 80 % de nouveaux clients … via Instagram. L’esthétique prime de plus en plus sur le goût, et change complètement la donne pour les start-up food. Beaucoup de clients – moi la première – ont tendance à préférer une jolie glace à une bonne glace. L’alliance des deux ? Jackpot.
Instagram, un média viral et engageant pour les marques
Pourquoi les marques ont-elles tant à gagner à saisir l’opportunité offerte par les réseaux sociaux ? Au-delà de canaux de communication qu’elles peuvent entièrement contrôler – ce que les médias ne leur offrent pas – c’est aussi, et surtout, un terrain où la réactivité et la créativité sont au cœur des enjeux. Instagram et Pinterest, en particulier, ont donné l’occasion à des consommatrices de s’inspirer des codes pratiqués par l’industrie de la mode, de la beauté et du luxe depuis plus d’un demi-siècle. Alors qu’elles ont feuilleté magazine après magazine, et visuel après visuel dans leurs chambres d’ado, leur smartphone est devenu le Canon des photographes, et leur produit chouchou du moment, la star de leurs réseaux sociaux. Plus besoin de passer par Cosmo : un packaging « on fleek » offre aux marques toute la couverture médiatique nécessaire, avec un meilleur reach et un cachet d’authenticité dont elles peinent à bénéficier seules.
Au-delà, le véritable enjeu des nouveaux canaux de communication est business : la stratégie d’inbound marketing est là pour séduire plutôt que convaincre car derrière chaque vue, derrière chaque like, se cache un client potentiel qui, abreuvé de contenu, se transforme peu à peu en afficionado.Les réseaux sociaux sont aujourd’hui devenues un canal essentiel pour les stratégies inbound des marques, qu’elles soient B2B ou B2C. En façonnant leur image, leurs produits et leurs valeurs, ces plateformes communautaires deviennent un véritable outil commercial. Il a suffi d’un coup d’œil au compte Instagram de Lov Organic pour me donner envie d’acheter son thé, et faire de sa boîte vide un cache-pot pour une plante grasse. On parie que, d’ici une semaine, mon DIY inspiré par la marque sera relayé sur mon propre compte Instagram ? Bingo.