En matière de communication responsable, tout le monde a désormais bien en tête que le papier n’est pas sans conséquence sur les ressources naturelles. L’idée que la communication digitale est aussi consommatrice d’énergie fait son chemin, mais cela reste encore abstrait pour nombre d’individus et d’entreprises.

Or, nous avons tous – conseils, créatifs, développeurs – un rôle à jouer pour faire des dispositifs digitaux de véritables leviers des politiques RSE, sans pour autant qu’ils ne perdent en efficacité ou en originalité.

 

Le 100% digital : pas si clean qu’espéré

 

Pendant longtemps, on a cru que le digital avait une empreinte environnementale quasi nulle par rapport à la communication traditionnelle. Celle-ci (affichage, supports papier, etc.) est visible, il est facile d’en estimer le coût carbone au fur et à mesure des différentes étapes de la chaine (impression, transport, recyclage). Le digital est moins palpable. Son principe de croissance exponentielle (selon la loi de Moore, les capacités du digital doublent tous les 2 ans) entre même en contradiction totale avec une partie des règles fondamentales de l’écologie. En outre, la technologie est devenue tellement transparente au fil des ans que la plupart des utilisateurs ne sont pas du tout sensibilisés à son impact. A tort… car entre l’hébergement des données ou l’exploitation des matériaux rares servant à la réalisation des smartphones, ordinateurs et objets connectés, on estime que le digital produit aujourd’hui plus de CO2 que le transport aérien(1).

 

« Si, à notre échelle, il n’est pas possible d’agir sur les infrastructures et les appareils, nous pouvons tenter d’influencer les usages, de participer activement à la pédagogie des utilisateurs et d’agir pour que les dispositifs soient nativement moins énergétivores. » 

Benoit Dassonville, Directeur associé chez La Suite & Co.

 

Eco-concevoir sa communication : comment ça marche ?

 

Dans l’imaginaire collectif, l’éco-conception est parfois associée à une perte de créativité ou à une dégradation de l’expérience utilisateur. Il n’en est rien, car il s’agit surtout de changer d’approche.

 

« Tout est question d’état d’esprit et de co-construction.
Les créatifs doivent aujourd’hui avoir une sensibilité technique.
Pour qu’un projet digital éco-conçu soit pertinent, original et efficace,
technique et création se doivent d’avancer de concert. »

Yannick Nozal, Directeur artistique chez La Suite & Co.

 

Voici quelques règles simples pour inscrire les projets digitaux dans une démarche durable et responsable :

  • Optimiser le code : un minimum de lignes de code pour la même efficacité. C’est parfois un challenge pour les développeurs mais cela permet de limiter le volume de requêtes serveur. Moins vous envoyez de code, moins vous consommez d’énergie.(2)
  • Limiter le recours aux images et aux vidéos et optimiser leur poids : pour réduire l’impact d’un site web. Pour les vidéos, cette contrainte peut être contournée par l’utilisation de gifs animés par exemple, qui permettent également de développer un lien plus personnel avec l’internaute.
  • Capitaliser sur les typographies : la typographie et la ponctuation peuvent devenir illustration, et avoir autant – voire plus – d’impact qu’une image. Depuis l’avènement de l’HTML 5, il n’y a plus aucune limitation technique à l’usage des différentes polices, puisqu’elles sont désormais hébergées par l’intégrateur et donc compatibles avec tous les navigateurs.
  • Privilégier le mode sombre : il s’agit d’offrir la possibilité d’activer un contenu sur fond noir. L’idée est de concevoir des sites nativement moins énergétivores en proposant des créations sombres qui requièrent moins d’énergie (notamment avec la généralisation des technologies LED ou OLED) que les créations dans les tons clairs. Le mode sombre s’envisage actuellement comme une alternative au mode dit normal. Tout l’enjeu de demain consiste à en faire une nouvelle norme.
  • Favoriser le flat design : autrefois la tendance pour la conception graphique des interfaces digitales était aux effets (ombre, brillance, texture, etc.). Mais ce mode de création est moins compatible avec les pratiques d’économie d’énergie. Le flat design quant à lui permet de radicaliser les principes graphiques du site et de favoriser le développement du mode sombre.
  • Responsabiliser l’utilisateur : les internautes n’ont pas toujours conscience qu’ils peuvent agir sur leur consommation d’énergie digitale. La communication en ligne doit pouvoir les informer et les engager, en leur proposant de passer à un mode de consultation plus économe (fond sombre, apparition des images ou défilement des vidéos uniquement au survol, absence de pré-chargement automatique, etc.).

 

« En tant qu’agence, il est de notre responsabilité d’intégrer ces bonnes pratiques d’éco-conception des systèmes à tous nos projets digitaux, et ce, dès leur genèse. Il nous faut accompagner les clients et les inciter à choisir des solutions plus responsables. »

Laure Brouillot, Directrice associée chez La Suite & Co.

 

Les dispositifs digitaux sont des produits durables et des médias vivants qui doivent pouvoir évoluer au fur et à mesure pour rester conformes aux usages et à la réalité de l’entreprise. Les envisager comme tels est aussi un élément de la démarche RSE : il est par exemple plus durable de faire évoluer son site web au fur et à mesure que de le refondre entièrement tous les trois ans.

 

Gardons surtout en tête que l’éco-conception n’est ni stérile et ni ennuyante. Bien au contraire : souvent, la créativité naît de la contrainte. C’est en imposant certains cadres techniques éco-responsables dès le début des projets que des idées nouvelles verront le jour et porteront les messages de façon originale et impactante. Combo gagnant pour nos métiers de communicants ! 

 

(1) Selon le rapport 2020 du Shift Project

(2) https://www.wired.com/story/sustainable-software-design-climate-change/