SFR devient Altice, la SNCF rebaptise ses TGV « inOui », et le groupe Canal vient de refondre l’ensemble de ses titres : exit D8, D17, Itélé et Direct Matin, on parle désormais de C8, C17, Cnews et Cnews Matin. Une homogénéisation assumée par Vincent Bolloré qui cache néanmoins une véritable révolution marketing pour ces entreprises. Quel intérêt les marques ont-elles à changer d’identité et à abandonner une partie de leur notoriété ?

TGV devient TGVinOui : Derrière l’image SNCF, le marché

Le changement de nom qui est sur toutes les lèvres ces dernières semaines, c’est celui annoncé par la SNCF. TGV devient « inOui » : un nom curieux qui s’inscrit dans une stratégie globale. Mais, sous couvert de vouloir harmoniser son offre diverse, entre les TGV Premium lancés récemment et les Ouigo low cost qui se déclinent de plus en plus, la SNCF s’offre le luxe de prendre une avance sur le marché. En effet, ses lignes s’apprêtent à s’ouvrir à la concurrence à l’horizon 2020.

Ouigo, Ouibus, Ouicar, aujourd’hui inOui et, bientôt, ce sera au tour de Voyages-sncf.com de se mettre à la page et de devenir Oui.sncf. Un changement d’identité global qui s’esquisse depuis 2013, mais la stratégie prend de plus en plus forme avec cette nouvelle offre que lance la SNCF : « inOui », une expérience de voyage. Le groupe aurait pu choisir OuiTrain ou OuiTGV, un branding plus en phase avec ses services, mais inOui lui permet de s’affranchir du moyen de locomotion associé à de nombreux retards, des tarifs élevés et une communication hasardeuse au moment où il développe ses services et incorpore notamment le wifi à bord. Une manière de prendre de vitesse ses futurs concurrents, et de tout faire pour ne pas perdre ses 105 millions de clients d’ici 3 ans.

SFR devient Altice : Derrière l‘international, l’image

À peine un mois après avoir annoncé la possibilité d’un changement de nom, c’est chose faite : SFR devient Altice, et s’aligne sur le branding de la maison-mère internationale. P. Drahi marche dans les pas de Vincent Bolloré et de son action au sein du groupe Canal + qui est tout sauf passée inaperçue. Pourquoi changer de nom ? Pour « adopter une marque globale, pour positionner plus clairement la stratégie d’Altice comme un acteur innovant, disrupteur, moderne », répond-il.

En se rebaptisant, Altice redore son image pour correspondre davantage aux valeurs identitaires des marques fortes de notre époque, j’ai nommé la disruption et le digital, et SFR s’homogénéise et s’offre une internationalisation plus impactante en s’inscrivant dans une stratégie globale. La politique du groupe est limpide : rassembler toutes les marques sous un seul nom : celui qui s’exporte le mieux. Car, à ses débuts, la Société Française du Radiotéléphone a d’abord songé à séduire un public français. C’est une erreur commune à bien des start-up : on se souvient de Covoiturage.fr qui est devenu Blablacar pour être plus scalable. Une opération qui lui a ouvert les portes du prestigieux club des « licornes ».

Dans un contexte où SFR a perdu près de 2,5 millions d’abonnés en deux ans et demi, et où la dégradation de son réseau a nui à sa notoriété, c’est pour son trentième anniversaire que le groupe a choisi d’abandonner son nom. Comme s’il était enfin temps de repenser son identité et de raconter une nouvelle histoire, plus en adéquation avec la mutation spectaculaire du groupe signée Drahi : restructuration majeure et une stratégie qui s’oriente désormais vers les contenus audiovisuels.

Ces vingt dernières années, près d’une entreprise sur deux cotée au CAC 40 a changé d’identité. On évoque en général trois raisons à cela : une fusion, un conflit juridique, ou la volonté de réinventer son image, notamment au travers de l’international.

On se souvient de Bio de Danone qui est devenu Activia, du Crédit Lyonnais qui s’est réinventé LCL suite au scandale Tapie, de GDF qui s’est transformé en Engie ou même du groupe Vivendi qui a déjà de nombreuses vies passées à son actif. Nouvelle identité, nouvelle image ?

Le nom, vecteur le plus élémentaire de la communication d’une entreprise, exige un gros investissement en communication pour asseoir sa légitimité dans l’imaginaire collectif. Un jeu qui en a largement valu la chandelle pour France Télécom, qui a signé l’opération de rebranding made in France la plus onéreuse : 220 millions d’euros pour que le grand public n’associe plus « suicide » et « France Télécom ». Carton plein pour Orange, et sans doute pour Altice et la SNCF.